Près de 10 000 Français en obésité sévère ont un accès précoce à un stylo-injecteur. Il entraîne une perte de poids de 15 % en moyenne mais pose problème : dépendance, effets secondaires, risque de pénurie pour les personnes diabétiques… Le point avec le docteur Natalia Leston, endocrinologue à Paris

Le surpoids et l’obésité gagnent du terrain en France : 47,3 % des Français sont en surcharge pondérale et 17 % d’entre eux sont obèses (contre 8,5 % en 1997), soit 8,5 millions de personnes, selon l’enquête Obépi-Roche de l’Inserm.

Ces kilos en trop ne sont pas sans conséquences sur la santé : « L’obésité est une maladie chronique et un facteur de risque majeur de « comorbidités » : diabète de type 2, hypertension artérielle, maladies cardiovasculaires, syndrome d’apnée du sommeil ou problèmes articulaires… », souligne le docteur Natalia Leston, endocrinologue, diabétologue et nutritionniste à Paris.

Depuis plusieurs mois, les médecins spécialistes de l’obésité et du diabète disposent dans l’arsenal thérapeutique de traitements nouveaux contre le diabète de type 2 mal équilibré et l’obésité sévère : des solutions injectables en stylos auto-piqueurs baptisées Ozempic (sémaglutide), Trulicity (dulaglutide), Vistoza (liraglutide) ou Saxenda (liraglutide).

Mis au point par les laboratoires Novo Nordisk ou Lily France, tous miment l’action du GLP-1, l’une des principales hormones digestives : ils abaissent la glycémie aidant l’organisme à libérer davantage d’insuline, réduisent la vidange gastrique et augmentent la sensation de satiété.

Une révolution dans la lutte contre l’obésité et le diabète de type 2 mal équilibré

« Quand on mange, des hormones sont sécrétées au niveau du tube digestif : elles stimulent la sécrétion d’insuline et donc baissent la glycémie (NDLR : taux de sucre dans le sang), signalant au cerveau qu’on a mangé et donc qu’on est à satiété », explique l’experte.

Ces traitements qui sont prescrits dans le cadre de la prise en charge du diabète de type 2 et/ou de l’obésité promettent tous la même chose : des pertes de poids massives. Ils peuvent également être prescrits en cas de prédiabète (glycémie à jeun à 1,06 g/l) et/ou de syndrome métabolique, d’obésité ou de surpoids avec facteurs de risque. « Et ils fonctionnent très bien, c’est une révolution ! », indique l’endocrinologue.

Les résultats sont bluffants : les patients obèses perdent en moyenne 15 % de la masse corporelle en quelques mois pour le Wegovy, médicament anti-obésité disponible aux États -Unis et bientôt en France (courant 2024), à 18 % pour l’antidiabétique Mounjaro ou l’amaigrissant Zepbound, disponibles aux États-Unis et dans certains pays d’Europe.

Des usages détournés générant des tensions d’approvisionnement

Tous ces traitements sont soumis à des restrictions ou pas encore commercialisés en France. En attendant, on constate des utilisations détournées de ces médicaments, qui font fureur sur les réseaux sociaux pour leurs propriétés amaigrissantes.

En seulement quelques clics, il est possible de s’en procurer sur le marché noir. Cela provoque des pénuries, qui devraient durer plusieurs mois. Les laboratoires qui les commercialisent, recommandent aux professionnels de santé de les réserver temporairement aux patients déjà traités.

« Un cortège d’effets secondaires »

Autre souci et pas des moindres comme prévient l’endocrinologue : « Ces traitements doivent être pris à vie car dès qu’on cesse de les prendre, les kilos reviennent et les comorbidités avec. Par ailleurs, ils entraînent un ralentissement de la vidange gastrique et un cortège d’effets secondaires : constipation, nausées, vomissements, douleurs abdominales et, à long terme, des risques d’occlusion intestinales, de calculs biliaires ou des inflammations du pancréas (pancréatites). Ils ne sont donc pas anodins. C’est pourquoi, ils doivent être réservés aux personnes diabétiques ou obèses qui présentent des comorbidités, pour qui le rapport bénéfices-risques reste à ce stade favorable ».

Quoi qu’il en soit, ces traitements ne remplacent pas une prise en charge globale avec un accompagnement nutritionnel, psychologique et de l’activité physique mais ils permettent d’éviter la chirurgie bariatrique aux personnes obèses. Encore faut-il les trouver !

Florence Heimburger

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