«Et pourtant, elle tourne », comme aurait dit Galilée après avoir été obligé d’affirmer le contraire. Et pas qu’un peu, qu’elle tourne : à 1 670 km/h au niveau de l’équateur, environ 1 000 km/h sous nos latitudes,
la différence étant due au fait qu’elle a plus de distance à parcourir à l’équateur, puisqu’elle y est plus grosse, dans le temps quotidien qui lui est imparti, à savoir 23 heures et 56 minutes. Et malgré cette vitesse conséquente, vous pouvez garder votre brushing en place toute la journée. C’est dû au fait que deux forces s’opposent : la force centrifuge est due à la rotation de la Terre ; et la force de gravitation, qui nous attire vers le centre de la Terre à cause de sa masse tellement plus importante que la nôtre. Mais ces deux forces sont très inégales : la première est de 0,2 m/s2 au maximum à l’équateur (et nulle aux pôles, toujours pour des questions de vitesse de rotation) alors que la seconde est de 9,8 m/s2 à peu près partout, soit presque cinquante fois plus importante. Voilà déjà pourquoi nous ne sommes pas expulsés comme de vulgaires feuilles de laitue dans une essoreuse : la gravitation nous colle au sol et annihile presque totalement la force centrifuge, elle nous pousse vers le sol cinquante fois plus fort que la force qui devrait nous projeter en arrière.


Cette dernière a tout de même un léger effet, mais uniquement sur des masses inertielles suffisamment grandes comme l’atmosphère ou les océans, qui ne suivent pas aussi rigoureusement que nous la rotation de la Terre.


Vitesse relative


La deuxième raison pour laquelle on ne sent rien, c’est que nous n’avons aucun organe pour ressentir la vitesse absolue. On n’est capable d’évaluer que la vitesse relative, c’est-à-dire par rapport à un référentiel : dans un avion, nous ne ressentons aucun effet de vitesse lorsque nous ne regardons pas par le hublot. Et là encore, la gravité supprime l’effet centrifuge : une mouche n’a pas plus de mal à voler dans un avion qu’au sol.

Notre seul moyen d’évaluer le déplacement dans l’espace, c’est le mouvement du Soleil et des étoiles, mais ils sont trop éloignés pour que cela nous donne une idée de vitesse. D’autant que cette vitesse est
constante, c’est ce qui nous empêche de la ressentir. Dans une voiture ou un train, on éprouve une sensation de mouvement parce que les freinages ou les cahots du sol suppriment cette constance, que ce soit horizontalement ou verticalement. Si la Terre venait à freiner brusquement, ça ferait un sacré barouf…


Mais si vous trouvez que la Terre tourne trop vite autour d’elle-même et que c’est un peu imprudent, dites-vous bien que le monde est beaucoup plus dangereux que ça : en plus de faire des excès de vitesse autour d’elle-même, elle se fait flasher à plus de 107 000 km/h autour du Soleil, qui lui-même est un chauffard qui va à 900 000 km/h autour du centre de la Galaxie. Ça ira pour le brushing ?

Jean-Luc Eluard

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