Mervétermajusaturneplu. Dans le « Manuel des Castors juniors » (on a les références qu’on peut), c’était le moyen mnémotechnique un peu barbare qui m’avait permis de retenir l’ordre des planètes du système solaire. Et voilà que tous ces efforts juvéniles sont tombés à l’eau : depuis dix ans, Pluton n’est plus une planète.

C’est à la suite d’un vote de l’UAI (Union astronomique internationale), qui représente les quelque 9 000 astronomes du monde, que la plus lointaine des planètes du système solaire n’est plus classée comme « planète ». Mais pourquoi contredire un fait établi depuis 1930 avec la découverte fortuite de Pluton par un astronome amateur ?

L’affaire remonte à 1978, lorsqu’on observe pour la première fois Charon, le satellite de Pluton. On s’aperçoit alors que la neuvième planète a une masse très inférieure à ce que l’on croyait jusqu’alors : un vingtième de celle de Mercure, l’autre plus petite de la classe. Elle est même plus petite que notre Lune. On ne s’en était pas aperçus avant parce que Pluton est très loin du Soleil (entre 4,425 et 7,375 milliards de km) et donc très peu éclairée. Bon, ça pouvait encore passer. Mais, à partir de 1992, ça se gâte : on découvre la ceinture de Kuiper, au-delà de Neptune, vaste amas d’objets célestes de tailles variées, au nombre de plusieurs milliards, dont environ 1 750 sont assez gros pour avoir été re- censés à ce jour. Eris en fait partie : découverte en 2003, elle a une taille à peu près équivalente à Pluton mais est 27 % plus massive. D’autres objets de même type sont observés. On pense alors que l’on va se retrouver avec une myriade de nouvelles planètes. L’UAI ne le voit pas de cet œil : elle donne une définition restrictive de la notion de planète, qui exclut Pluton.

Trois critères sont pris en compte : pour qu’un objet soit une planète, il doit tout d’abord tourner autour du Soleil ; ensuite, il doit être suffisamment massif pour avoir une forme ronde ; enfin, il doit avoir débarrassé son orbite des autres objets célestes, et là, ça coince parce que Pluton a laissé un peu le bazar dans son orbite encombrée de myriades d’autres corps spatiaux. Elle se retrouve donc « rétrogradée » au rang de « planète naine », nouveau concept qui permet d’accueillir les nouvelles découvertes que sont Eris, Cérès, Hauméa et Makémaké. Elle a quand même droit à une consolation : elle est leader des plutoïdes, sous-catégorie des planètes naines. Et non pas des amis de Pluto, n’en déplaise aux Castors juniors.

Jean-Luc Eluard

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