Ce n’est pas l’île Maurice mais l’île de Raymond est aussi un petit paradis. Facilement accessible : elle n’est séparée de la terre ferme que par un bras mort de la Garonne. Surtout, elle est au centre d’une expérience de renaturation du milieu après sa surexploitation agricole.

Il y a eu de tout sur sur l’Île de Raymond pas si perdue, à trois petits mètres du « continent » en Gironde. Les derniers temps, il y avait même du maïs OGM. Alors quand la communauté de communes du Vallon de l’Artolie (désormais Convergence Garonne) décide de d’acheter l’île de Raymond, à Paillet, en 2010, il s’agit clairement de lui redonner sa vocation de milieu îlien et humide. Et aussi de l’ouvrir au public.

C’est un bras mort de la Garonne, remis en eaux récemment, qui sépare l’île de la berge. Un pont l’enjambe pour accéder à l’île

Et tout le travail depuis consiste à trouver un juste équilibre entre la fréquentation humaine, bien balisée, le retour à un état naturel encadré et les travaux universitaires menés par le laboratoire Biogeco de l’université de Bordeaux. Ce dernier s’intéresse pour sa part à la renaturation sans contrôle. Pour cela des zones préservées sont maintenues sans intervention d’aucune sorte pour observer quelles espèces reconquièrent lentement un espace laissé à l’abandon.

Cinq chercheurs travaillent sur le sujet et ont pu constater que le retour à l’état naturel est très rapide dans les zones les plus humides et plus lent dans la zone de prairie. Dans le même temps, les espèces animales reconquièrent plus vite le milieu que les végétales… parce qu’elles peuvent se déplacer.

Aider la nature

Mais l’essentiel de la surface (30 hectares sur les 44 de l’île) est occupé par une prairie entretenue naturellement par des moutons : « On évite ainsi les arbres et les ronces. Et cet écosystème de prairie manque cruellement dans la vallée de la Garonne alors qu’il était autrefois le plus fréquent. » souligne Florian Bousquet, animateur en charge de la gestion de l’espace. Et c’est l’éternel dilemme entre l’intervention de l’homme et le laisser-faire : « On contrôle sans transformer. On observe et on donne un coup de main à la nature. » Notamment en éliminant le plus possible les espèces invasives, à la main.

L’île Raymond bouge encore

Dix ans après sa remise en nature, l’île de Raymond continue son changement progressif avec un accroissement général de la biodiversité, aussi bien en nombre d’espèces qu’en individus. Et l’île elle-même continue de bouger : elle garde dans sa forme son passé de chapelet d’îlots qui se sont réunis lorsque la Garonne a été canalisée.

Et les anciens canaux retrouvent leur forme, accueillent des roselières où l’on trouve notamment l’emblématique angélique des estuaires, si symbolique de la flore locale menacée. Mais le travail d’observation est loin d’être achevé et tout continue de bouger : « On n’est pas encore dans l’optimum. Il faudra au moins 15-20 ans pour que tout soit équilibré. » Et l’île de Raymond aura réussi alors son retour à la nature.

Jean-Luc Eluard

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