À en croire le célèbre adage, les femmes seraient plus dangereuses que les hommes au volant. C’est faux, et même tout le contraire ! On débunke cette idée reçue suite à la parution du bilan 2022 de la sécurité routière, avec Florence Guillaume, générale de gendarmerie et déléguée interministérielle à la sécurité routière

Les clichés ont la vie dure ! Souvent moquées, accusées d’être de mauvaises conductrices, les femmes causent, en réalité, nettement moins d’accidents corporels et meurent moins sur la route que les hommes. Et ce à kilomètres parcourus équivalents.

En effet, selon les chiffres du bilan (provisoire) 2022 de la sécurité routière publiés le 1er février 2023 par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, 78 % des personnes décédées sur la route sont des hommes. Et 84 % des responsables présumés d’accidents mortels et 93 % des conducteurs alcoolisés impliqués dans un accident (chiffres 2021) sont des hommes.

Plus surprenant, cette surreprésentation masculine se retrouve quel que soit le mode de déplacement : 94 % des personnes tuées à moto, 87 % des morts à vélo, et 61 % des piétons décédés étaient des hommes (chiffres 2021).

Une accidentologie masculine qui augmente

« Certes, il y a plus de motards que de motardes, et de cyclistes hommes que femmes, indique Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la sécurité routière. Mais l’écart entre hommes et femmes n’en demeure pas moins conséquent et interroge. Il a toujours existé mais s’est encore creusé puisqu’en 2016, 75 % des morts sur les routes étaient des hommes contre 78 % aujourd’hui. Cette surmortalité masculine se retrouve dans toutes les tranches d’âges, et est particulièrement marquée chez les 18-24 ans (88 % des jeunes conducteurs tués sont des hommes). »

Pourquoi de telles différences entre hommes et femmes ? Les hommes conduiraient-ils moins bien ? Plus souvent sous l’emprise de l’alcool ou de drogues ? Et avec une voiture plus puissante ? Prendraient-ils plus de risques au volant ou à pied ?

Symbole de la virilité des hommes

« Il y a plusieurs facteurs, explique la générale de gendarmerie. Nous ne sommes pas en mesure de tous les identifier clairement. Toutefois, on sait que chez les hommes les trois principaux facteurs d’accidentalité sont la vitesse, l’alcool et la prise de stupéfiants (cannabis, cocaïne, opiacés…), et chez les femmes, la vitesse (aussi), l’inattention et le refus de priorité. »

Par ailleurs, l’étude sociologique « Masculinité et risques routiers » des sociologues Cyrille Dupré-Gazave et Alain Mergiera a montré que certains stéréotypes perdurent : dans l’esprit de bon nombre de Français, la voiture demeure fortement associée à une manifestation identitaire de la virilité des hommes. Rouler vite, alcoolisé et d’autres types de comportements à risque seraient associés à la masculinité.

Toujours selon ces clichés, l’homme aurait une forme d’aptitude naturelle pour la conduite, et la femme serait plus prudente. « Du fait de ces stéréotypes, les hommes sont peut-être davantage enclins à prendre des risques », suppose Florence Guillaume. 

C’est pourquoi, la dernière campagne de la Sécurité routière qui s’est déroulée du 8 au 22 février 2023 a ciblé, de manière décalée, les hommes et leur virilité et le slogan : « Soyez l’homme que vous voulez être, mais soyez un homme vivant ».

« Pendant longtemps, les pouvoirs publics ne se sont pas emparés de la différence de mortalité au volant entre les hommes et les femmes car c’est un sujet délicat. Mais elle est bien réelle », souligne la déléguée interministérielle à la sécurité routière.

Le téléphone dans la main des hommes

Femmes et hommes n’ont pas non plus le même usage du téléphone portable au volant, responsable de 13 % des accidents mortels (soit 369 personnes décédées) et de 23 % des accidents corporels. En effet, selon une analyse statistique réalisée en 2020 par l’institut belge pour la sécurité routière Vias, 3,6 % des hommes utilisent le téléphone au volant contre 2,4 % des femmes. Et 3,7 % des hommes le manipulent sur autoroute contre 1,6 % des femmes.

En France, 80 % des automobilistes utilisent leur téléphone au volant : 52 % des conducteurs français téléphonent en conduisant et 34 % envoient ou consultent un message au volant, selon le baromètre du comportement des Français sur la route d’Axa Prévention réalisée auprès de 2200 personnes en 2022. D’où une autre campagne de prévention au slogan « Si tu conduis, je raccroche », à l’occasion des journées mondiales sans smartphone, du 6 au 8 février 2022.

Et en toute situation, les hommes devraient redoubler de prudence !

Florence Heimburger

Les usagers « non carrossés » meurent plus que les automobilistes

A la vitesse, l’alcool, les stupéfiants, la fatigue et la conduite masculine (voir ci-dessus), on peut ajouter le fait d’être « non carrossé » sur la liste des facteurs de risque de mortalité sur la route.

Pendant leur trajet en transports doux, les Français encourent plus de risques qu’en prenant leur voiture. En effet, pour l’année 2022, sur les 3260 personnes décédées sur les routes de France métropolitaine, moins de la moitié des personnes tuées étaient des automobilistes (48 %), tandis que la part des usagers vulnérables, c’est-à-dire « non carrossés » (piétons, cyclistes, trottinettes, deux-roues motorisés…), parmi les accidents mortels s’est renforcée (52 %).

Aussi, Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la sécurité routière, lance à l’adresse des cyclistes, trottinettistes et piétons : « Rendez-vous visibles, gare à la tombée de la nuit ! Vous êtes des usagers plus vulnérables car « non carrossés ».

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