La ressource en eau diminue et le changement climatique appuie encore plus, là où ça fait mal. Le partage de l’eau entre les activités humaines et les écosystèmes peut devenir une source de tension. Pour arriver à des consensus et atteindre un « bon état de l’eau », la véritable innovation sera plutôt sociale que technologique
L’eau coule et se joue de nos frontières départementales ou régionales. Une gestion, plus logique, se fait selon un découpage de la France métropolitaine en 6 territoires structurés autour des principaux fleuves, appelés grands bassins. Chacun d’entre eux s’est vu doté, par la loi de l’eau de 1964, d’une agence de l’eau. La région Nouvelle-Aquitaine, quant à elle, se trouve à cheval sur deux bassins, le Bassin Loire-Bretagne et le Bassin Adour-Garonne. Situé dans le Sud-Ouest de la France, le Bassin Adour-Garonne est davantage touché par le réchauffement climatique. Les deux tiers de ses rivières sont en déficit quantitatif. L’eau y circule mal, stagne et sa qualité se dégrade rapidement.
Au niveau du Bassin, la stratégie se joue au parlement de l’eau
L’eau est un bien commun, placée sous tutelle de l’État français et sous la Directive-cadre européenne (DCE). Objectif : atteindre, d’ici 2027, un bon état général des eaux souterraines et de surface.
« À l’échelle du bassin, la vision stratégique est donnée par le comité de bassin. C’est un véritable parlement de l’eau où les acteurs décident de l’usage de l’eau, qu’il soit agricole, industriel, particulier ou même environnemental 1. L’agence de l’eau joue les coordinateurs et apporte la connaissance sur la ressource 2 et sur la partie technique », explique Guillaume Choisy, Directeur général de l’Agence de l’eau Adour-Garonne.
Des solutions locales adaptées au territoire
Au sein d’un grand bassin, les réseaux hydrographiques se suivent, mais ne se ressemblent pas. Les problématiques sur le sous-bassin de la Charente ne sont pas les mêmes que celles du sous-bassin de la Garonne. Voilà pourquoi les commissions locales de l’eau (CLE) sont missionnées, avec les mêmes typologies d’acteurs qu’au parlement de l’eau, pour adapter la stratégie du grand bassin à leur territoire. Et quand la rivière est asséchée ou polluée, un Projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE), une sorte de plan ORSEC, est lancé.
Un dialogue qui ne coule pas toujours de source
« Nous sommes une quarantaine de personnes autour de la table. En général, la raison l’emporte. Je trouve cependant que la part gardée pour le débit de la rivière est insuffisante. Elle est indispensable notamment pour maintenir les zones humides, qui contribuent à réguler la ressource en eau des sols », témoigne Jacques Brie, Vice-président de Charente Nature et membre de la CLE du sous-bassin Charente. De leur côté, les agriculteurs, souvent accusés de trop irriguer, doivent faire face au changement climatique et préserver leur sol en maintenant une certaine humidité.
L’intérêt de partager un diagnostic
Pour Guillaume Choisy, « Les traditionnels clivages entre agriculteurs et associations environnementales sont essentiellement psychologiques. La clef d’une concertation réussie est de partager un diagnostic et des perspectives avant de chercher des solutions ».
Mais la concertation se fait souvent après que le diagnostic et les solutions soient donnés par les experts et les décideurs. Une ingénierie de la participation émerge cependant. Elle rebat les cartes et implique tous les acteurs dès la conception des projets, depuis la définition des rôles jusqu’à la construction d’un plan d’action en passant par l’élaboration d’un diagnostic partagé. Le prix d’un dialogue apaisé et d’une confiance restaurée ? Du temps et de la formation.
Sophie Nicaud
1 : Le comité de bassin définit un schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE). Celui-ci sera décliné en SAGE (Schéma d’aménagement et de gestion des eaux) au niveau d’un territoire, un sous bassin.
2 : suivi des volumes et suivi chimique et physique des rivières et des nappes phréatiques
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