Le ver plat de Nouvelle-Guinée, Platydemus manokwari. Photo par Pierre Gros, CC BY-SA

Le format « Images de science » vous propose de décrypter une photographie particulièrement signifiante d’un point de vue scientifique, de la décrire et d’en comprendre les enjeux.


Au début de l’année 2019, quand nous avons reçu la première mention du ver plat de Nouvelle-Guinée, Platydemus manokwari, en Guadeloupe, c’était un peu inquiétant. Cette espèce est considérée comme très envahissante. C’est un prédateur d’autres animaux du sol. Elle a été repérée dans beaucoup d’îles en Océanie et nous l’avions signalée en 2015 pour la première fois aux Antilles, à Porto Rico. Nous avons alors publié en mai 2020 un court preprint (un article non corrigé par la communauté scientifique) pour signaler sa présence en Guadeloupe – à l’époque, cela était une observation un peu anecdotique.

Fin 2020, nous avons travaillé sur une autre espèce de ver plat, Amaga expatria, qui semble relativement commune en Guadeloupe et Martinique. À cette occasion, nous avons relayé notre recherche dans The Conversation et les médias locaux ont parlé de vers plats terrestres – probablement pour la première fois dans ces îles. Chaque fois que j’en ai eu l’occasion, à la radio et à la télévision, j’ai appelé les personnes qui trouvaient un ver bizarre dans leur jardin à m’envoyer leur observation.




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Les résultats ont été impressionnants de rapidité. En quelques semaines, nous avons reçu des dizaines de signalements. Les gens ont envoyé des photos ou des films faits avec leur smartphone dans leur jardin ou dans leur maison – Platydemus manokwari a tendance à aller sur les terrasses ou à monter sur les murs. Et voilà le résultat dans cette carte, dans son implacable vérité : la totalité de la Guadeloupe, aussi bien Grande-Terre que Basse-Terre, est envahie. Même Marie-Galante est contaminée !

La carte de Guadeloupe de l’invasion par le ver plat de Nouvelle-Guinée, Platydemus manokwari, basée sur la science participative. Les zones vertes sont les communes envahies. Carte par Jessica Thévenot

Cette carte montre le pire et le meilleur. Le pire : elle illustre la terrible menace des invasions biologiques. Les espèces exotiques envahissantes constituent une des principales menaces contre la biodiversité, et coûtent très cher à l’humanité. Une espèce jamais signalée en Guadeloupe avant 2018 a ainsi envahi toute l’île en seulement deux ans !

Le meilleur : la formidable puissance de la science participative qui permet, grâce à la gentillesse des personnes qui signalent des espèces, d’acquérir des informations scientifiques à vitesse record. Merci encore à toutes ces personnes : elles reconnaîtront leurs initiales dans le Tableau publié dans l’article (en accès libre et gratuit).

Une bonne nouvelle : la Martinique n’est pas envahie. En fait, pas encore… nous avons déjà un signalement de Platydemus manokwari. Combien d’années avant une invasion totale comme en Guadeloupe ? Plus que jamais, les signalements de science participative nous sont indispensables. Les lecteurs peuvent les envoyer ici.The Conversation

Jean-Lou Justine, Professeur, UMR ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

 

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