sardines

Il ne s’agit ni d’une fake news, ni… d’un poisson d’avril. Depuis quelques années, les sardines du golfe de Gascogne ont rétréci et perdu du poids. Elles vivent aussi moins longtemps ! Ce phénomène, qui pourrait être lié aux changements climatiques en cours, inquiète les scientifiques de l’Ifremer

14 centimètres. C’est la taille maximale des sardines* de 1 an pêchées aujourd’hui dans le golfe de Gascogne. Au début des années 2000, ces petits pélagiques mesuraient 3 à 4 centimètres de plus. À ce « rétrécissement » s’ajoute une inquiétante perte de masse. Sur la balance, leur poids a été divisé par deux, passant de 40 à 20 grammes en moyenne ! « A âge égal, ces poissons sont plus petits et moins gros qu’avant », relève Martin Huret, chercheur halieute à l’Ifremer, co-responsable du projet Defipel**.

 

En l’espace de dix ans, les sardines du golfe de Gascogne ont perdu près de 4 centimètres. PHOTO DR Martin Huret / Ifremer

Le réchauffement climatique en cause?

Cette situation pourrait être l’une des conséquences des changements climatiques en cours. Car l’augmentation de la température des eaux de surface s’accompagnerait d’une diminution du zooplancton dont les sardines se nourrissent. « La quantité de nourriture disponible joue évidemment, mais plus que la quantité, c’est peut-être la qualité et la composition du zooplancton qui est en cause », estime Martin Huret. Cette hypothèse n’est toutefois pas encore validée. En revanche, les conséquences de cette méforme des sardines ne font guère de doute.

Des sardines plus fragiles

La perte de poids des sardines n’est pas sans incidence pour le renouvellement de leurs populations car « la quantité d’œufs pondus dépend du poids de la femelle ». Moins gros, les poissons sont surtout moins gras à la fin de l’automne. Cette perte de masse graisseuse les rend « moins aptes à passer l’hiver sous nos latitudes ». Moins grasses, plus fragiles, les sardines meurent donc prématurément. « Aujourd’hui il devient rare de trouver des sardines âgées de plus de 6 ans dans le golfe de Gascogne, alors que dans les années 2000 les pêcheurs ramenaient fréquemment des individus de plus de 10 ans ».

Des sardines moins nourrissantes

Les conséquences en chaîne de cette méforme des sardines ne s’arrêtent pas là. « La diminution de leur taux en matières grasses et de leur teneur en oméga 3 les rend aussi moins intéressantes au plan nutritionnel pour leurs prédateurs (comme les thons, les bars, les merlus, mais aussi les dauphins et autres mammifères marins), et pour les consommateurs », relève Martin Huret. Dans le golfe du Lion, où ce phénomène est encore plus inquiétant, les sardines sont devenues si petites qu’elles ne trouvent même plus de débouchés (voir encadré). L’ensemble de la chaîne trophique et le socio-écosystème constitué par la filière française de pêche des petits pélagiques est donc potentiellement en péril.

* Les anchois connaissent également un rétrécissement et un amaigrissement notable.
**Porté par l’Ifremer, le projet DEFIPEL (2019-2023) cherche actuellement à développer une gestion intégrée de la filière des poissons petits pélagiques afin de mieux anticiper les changements à venir.

Alexandrine Civard-Racinais

 

Méditerranée : des sardines encore plus petites !
Dans le golfe du Lion, les sardines d’un an sont passées de 13 à 10 centimètres et ne pèsent plus que 10 grammes (contre 30 par le passé). Il est en outre devenu rare de trouver des sardines de plus de 4 ans. Conséquence : « il n’y a plus de débarquement de sardines en raison de l’absence de débouchés », commente Martin Huret et les conserveries se tournent désormais vers d’autres sources d’approvisionnement étrangères.

Image par Kasjan Farbisz de Pixabay

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